Je sais ce qu'aujourd'hui nous aurions fait si. Mais ce qui n'est plus n'est pas, le mesurer n'empêche pas qu'aujourd'hui je me complaise à la douceur de l'irréel, du passé, que je rétroprojette, que je lanterne magique. Si tu avais été de ce matin d'octobre -si tu avais été- c'est un matin enchanté que celui-ci, tu aurais pris le temps de te réveiller, tu aurais trainé au petit déjeuner, et nous serions partis prendre un café à Conleau, à l'hôtel du Roof ou sur le petit quai, selon le vent, selon l'envie. Aujourd'hui la lumière pleut sur le velux de la chambre d'amis, la radio murmure, parle d'été indien, de remontée tropicale, dit des riens de radio du dimanche, je la coupe avant le foot -tu aurais mis tes lunettes de soleil et bien sûr j'aurais oublié les miennes. Lumière ruisselante des transparences d'octobre sur les premières feuilles jaunies, chant des couleurs des bateaux au mouillage, dont le vent par risées, fait tinter les câbles, tout nous aurait ravi, nous aurions savouré la tiédeur des pierres, nous aurions oublié, pour une heure ou deux, le réchauffement climatique, ta maladie, mais aussi le déjeuner du dimanche, rien de prêt, rien de préparé, et à notre retour constater que Thibaud mangeait tranquille des céréales, tes enfants mangeaient quand il leur plaisait.
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