Il ventait à la Torche, sur la pointe du Raz, sur la côte sauvage, on en était saisis, comme si rien ni jamais ne pourrait changer là, comme si l'écume jaune et blanche, comme si la stupeur du granit, la houle fracassée entre vert, bleu, gris et bronze, comme si le ciel, l'élémentaire orgie jouait d'un autre temps, qui ne pouvait être le nôtre. Et cependant la côte recule, les abers nous annoncent le destin des fleuves, on a empierré, c'est un peu vain, les bords de la plage où nous avons dormi derrière un un rideau théâtral, à Plougasnou où cinq surfeurs attendent inlassablement la vague de bonne période, question de rythme, affaire de temps. Le temps nous manque la dentelle blanche de l'éventail se déploie sur la grève brunie d'algues, laminaires arrachées des fonds par la marée, par la tempête, comme le furent les pins les cupressus qui protégeaient le jardin Georges Delasselle au bout de Batz -je nomme le jardin, pas la tempête. Le temps nous manque et cependant on a reconnu la Laïta, ses dix kilomètres ses restes d'abbaye dans une lumière inchangée un chêne beau comme un poème, jusqu'au Pouldu cet étrange estuaire dont la barre d'écume brille comme l'acier, brisant la douceur de l'anse. On s'est arrêté là, c'est là qu'on reviendra, une autre fois, qu'on tâchera de retrouver.
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